Lettre d'actualité du droit de l'urbanisme - juin 2025

 

 1 ) Actualité réglementaire : article 1er du décret du 26 mai 2025 n° 2025-461 prorogeant le délai de validité des autorisations d'urbanisme délivrées entre le 1er janvier 2021 et le 28 mai 2024

 

J'ai une bonne et une mauvaise nouvelles. 

🙂 La bonne, c'est que l'article 1er du décret proroge les autorisations accordées (PC/PCMI/PA/PD/DP) entre le 28 mai 2022 et le 28 mai 2024 qui voient leur durée de validité portée de 3 à 5 ans (par dérogation à l'article R. 424-17 CDU).

🤨 La mauvaise, ou en tout cas la moins bonne, c'est que ces autorisations à la validité allongée ne pourront pas être prorogées comme le prévoit l'article R. 424-21 CDU.

🔍 Donc... Le décret n'allonge pas comptablement la durée de validité des autorisations. Il accorde une prorogation automatique à leurs titulaires, alors qu'en l'état actuel du droit, cette prorogation de deux ans supposerait deux demandes successives et pourrait être l'objet d'un refus en cas d'évolution défavorable de la réglementation. 

🛎️ La nuance est mince, mais elle mérite d'être formulée.

Le texte du décret est toujours disponible ici

 

 

2 ) Actualité réglementaire : article 2 du décret du 26 mai 2025 - pourquoi faire simple ?

 

Passons à l'article 2 I. du décret n° 2025-461 du 26 mai 2025.
Le texte prévoit que "I. - Par dérogation aux conditions posées aux articles R.* 424-21 à R.* 424-23 du code de l'urbanisme, le délai de validité des permis de construire, d'aménager ou de démolir et des décisions de non-opposition à une déclaration préalable intervenus entre le 1er janvier 2021 et le 27 mai 2022 est prorogé d'un an".

👉 Prenons un exemple : Le maire d'une commune a notifié un permis de construire le 23 mars 2021 au pétitionnaire qui l'avait sollicité. A compter de ce jour s'est ouvert le délai de trois ans, prévu à l'article R. 424-17 al. 1er CDU, dans lequel les travaux doivent être engagés.

Trois hypothèses sont alors envisageables.

1️⃣ Si les travaux n'ont pas été engagés au 23 mars 2024 et qu'une prorogation n'a pas été sollicitée et obtenue valablement, le PC est périmé à cette date. Le décret n° 2025-461 ne s'appliquant qu'aux autorisations en cours de validité à la date de sa publication (art. 3), il n'a donc pas d'intérêt dans ce cas. Mince...

2️⃣ Si les travaux ont été engagés et qu'ils ne sont pas achevés à la date d'aujourd'hui, le PC n'a plus besoin d'être prorogé puisque passé le délai de 3 ans (délai vu plus haut), il tombe sous le coup de l'article R. 424-17 alinéa 2 et ne sera caduc que si les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année. Donc, ce permis de construire peut être encore valable le 27 mai 2025 mais, dans ce cas, le décret n'a strictement aucun intérêt le concernant. Mince (bis).

3️⃣ Si les travaux sont achevés, le permis est périmé depuis la date d'achèvement mentionnée dans la DAACT. Le décret n'a là non plus aucun intérêt. Mince (ter).

🛎️ La synthèse de tout cela ?
Seuls les PC délivrés entre le 01/01/2021 et le 28 mai 2022 dont les travaux n'ont pas débuté à la date d'aujourd'hui, et n'étant pas périmés du fait d'une ou plusieurs (2 max) prorogation(s), sont en mesure de bénéficier de l'application de l'article 2 du décret.

🛎️ 🛎️ Et la conclusion de la synthèse ?
Y avait pas plus simple à faire non ? Par exemple en mettant toutes les autorisations à la même enseigne (celle de l'article 1er), à savoir une durée de validité portée à 5 ans en remontant au 28 mai 2021.

 

Le texte du décret est toujours disponible ici

 

3 ) Jurisprudence : le certificat d'urbanisme ne doit pas piéger le pétitionnaire

 

Le certificat d'urbanisme doit bénéficier à l'auteur d'une demande d'autorisation et non pas le pénaliser.


Dit autrement, la demande d'autorisation doit être instruite sous l'empire des règles en vigueur au jour de sa signature si le projet leur est conforme, sans tenir compte du certificat d'urbanisme en cours de validité et ayant cristallisé des dispositions antérieures. 


Si vous venez de vous dire (ou de penser) "bah, oui évidemment"... tout est normal. Vous le saviez déjà. Moi aussi. 


La Cour administrative d'appel de Paris, non. Le Conseil d'Etat vient de le lui rappeler (
CE, 6 juin 2025, n°491748, A. c/ Mairie des Lilas)

 

"3. Les dispositions de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme ont pour effet de garantir à la personne à laquelle a été délivré un certificat d'urbanisme, quel que soit son contenu, un droit à voir sa demande de permis de construire, déposée durant les 18 mois qui suivent, examinée au regard des dispositions d'urbanisme applicables à la date de ce certificat, à la seule exception de celles qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique. Elles n'ont en revanche ni pour objet ni pour effet de la priver de son droit d'obtenir un permis de construire lorsque son projet est conforme aux règles d'urbanisme applicables à la date de la décision prise sur sa demande ou, si le projet n'est pas conforme à celles de ces règles qui n'ont pas pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique ou à une partie divisible d'entre elles, lorsqu'il l'est aux règles de même objet applicables à la date du certificat d'urbanisme.


4. Par suite, en jugeant que les dispositions du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal d'Est Ensemble n'étaient pas applicables à la demande 
de permis de construire de Mme A... et que sa demande devait être examinée au regard des seules dispositions du règlement du plan local d'urbanisme de la commune des Lilas applicables à la date de délivrance du certificat d'urbanisme, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit."

 

Le texte de l'arrêt est disponible ici

 

4) Actualité législative : Adoption de la proposition de loi visant à faciliter la transformation des bureaux et autres bâtiments en logement

 

Une dérogation de plus dans le code de l'urbanisme pour une seconde de vie des bâtiments ! Un petit article pour un grand pas vers la durabilité. Dans quelques jours, un bâtiment existant pourra accueillir une nouvelle destination pourtant interdite par le règlement du PLU applicable.


La proposition de loi visant à faciliter la transformation des bureaux et autres bâtiments en logement a été définitivement adoptée la semaine dernière (5 juin).


🗓️ Voilà un texte qu'on a vu venir de loin puisque cette proposition de loi avait été déposée par le député Romain Daubié en février 2024.


⏲️ La loi "Daubié" devrait donc être promulguée sous peu. Elle ne nécessite la publication d'aucun décret pour s'appliquer.


Le régime du changement de destination va se trouver sur le fond très fortement perturbé.

L'article 1er 2° de la loi crée ce que l'on pourrait appeler un régime de dérogation généralisé aux dispositions du règlement des PLU limitant ou interdisant les destinations et sous-destinations dans une zone (le joli tableau à l'entrée du règlement écrit...).

Le dispositif trouvera sa place dans le nouvel article L. 152-6-5 du code.


Dès lors que la destination du bâtiment existant n'est pas "habitation", un porteur de projet pourra prétendre en changer en dérogeant aux règles du PLU.


1️⃣ Cette dérogation pourra concerner des surfaces existantes mais aussi des surfaces créées à l'occasion d'agrandissement (extension et surélévation). La dérogation ne pourra pas être utilisée pour autoriser la réalisation d'une construction nouvelle.


2️⃣ Précision d'importance, ce n'est pas le recours à la dérogation qui devra être motivé mais le refus d'en faire bénéficier le pétitionnaire qui s'en réclame. Du travail en plus pour les services instructeurs !


3️⃣ Or ces motifs de refus de dérogation sont limités à l'alinéa 2 du nouvel article L. 152-6-5 I (risques / accessibilité / capacité des équipements scolaires / mixité sociale)


4️⃣ Il conviendra d'obtenir l'avis conforme de l'autorité compétente en matière de PLU pour utiliser la dérogation. On observera qu'il s'agit donc du conseil municipal (PLU) ou de l'organe délibérant de l'EPCI (PLUi)... quid alors du délai d'instruction de la demande d'autorisation dans ce cas, puisque cette consultation n'intègre aucune majoration de délai ?


5️⃣ Mieux, le dispositif ne s'applique pas qu'en ville. En dehors des STeCAL, il concerne aussi les zones A, N et F des PLU. Avec maintien de l'avis conforme de la CDPENAF et de la CDNPS, déjà imposé (L. 151-11 2°).


6️⃣ Le dernier alinéa apporte une condition temporelle nouvelle au recours à la dérogation pour le changement de destination de bâtiments agricoles et forestiers, l'exercice d'une activité agricole ou forestière devra avoir cessé depuis plus de 20 ans.


⚠️ Le régime des formalités d'urbanisme concernant les changements de destinations et de sous-destinations (PC/DP/SF) n'est pas l'objet d'évolution.

 

Le dossier de presse de la proposition de loi adoptée et bientôt promulguée est disponible ici

 

5 ) Documentation : Les enseignements de l’instruction des autorisations d’urbanisme individuel en espaces protégés dans l’Eure, 2008-2025 

 

L'ADS est non seulement le témoin des effets de bascule de la réglementation et des grandes tendances de la consommation mais aussi, et surtout, de l'état 

psychologique des propriétaires fonciers. 


Voyez plutôt cet article de France POULAIN procédant à l'analyse de quinze ans de données statistiques de l'UDAP 27.

 

 Pour le lire, c'est ici

 

6 ) Documentation : la voirie du lotissement - préparer l'avenir et réparer le passé

 

L'Institut d'études juridiques du Conseil supérieur du Notariat vient de produire un document de 4 pages sur les enjeux de la conversion d'une voie privée de lotissement en voirie publique : gestion de l’espace public, entretien des infrastructures et responsabilités des colotis, notamment. 

 

Le document fait le tour de la question : ASL, copropriété et transfert à la collectivité publique.

 

Il est disponible sur le profil linkedin du CSN : https://www.linkedin.com/company/notaires-de-france/posts/?feedView=all

 

Rendez-vous en juillet !

 

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